vendredi 21 novembre 2008

Commentaire de notre Vicaire...

... à propos de la réunion du 9 novembre sur la Conversion de Paul
Nous nous sommes réunis le dimanche 9 novembre à 10 h 30 à la Chapelle de Lorette pour échanger au sujet de la conversion de l'Apôtre. Et cela autour de notre ex-paroissien, Pierre Breughel, le Vieux.

Voici l'essentiel de notre échange:

1. On trouve dans la Bible cinq récits différents de la conversion de Paul:
· dans les Actes des Apôtres, chapitre 9, 22-26
· dans la lettre aux Galates, chapitre 1, 11-17
· dans la première lettre aux Corinthiens, chapitre 15, 3-8.
Ces récits correspondent globalement, avec une particularité cependant. C'est qu'Ananie – le chef de la communauté chrétienne de Damas – est absent en Acte 26 et Galates. Ce qui n'est pas dramatique puisque la révélation à Paul porte précisément sur le fait que l'Eglise, la communauté des croyants, forme le corps du Christ. Donc le responsable d'une communauté est bien celui qui va transmettre à Paul la volonté de Dieu.

2. Pourquoi y-a-t-il tant de récits de la conversion de l'Apôtre?
C'est que Paul affirme être Apôtre. Or il existait un groupe d'apôtres désignés par Jésus lui-même: ce sont les "12 Apôtres". Paul n'a pas connu Jésus selon la chair et Jésus n'a jamais rencontré Paul. D'où les problèmes constants de l'apôtre qui, partout où il va dans les synagogues, rencontre des "sur-apôtres" qui s'estiment supérieurs à Paul parce que ceci ou cela. Ce qui fait la qualité de l'apostolat de Paul est très clairement indiqué dans la lettre aux Corinthiens: Paul, c'est vrai, n'a jamais connu Jésus, mais il a entendu le Seigneur, le Seigneur l'a envoyé, il l'a rempli de l'Esprit Saint et toutes ses souffrances authentifient sa mission.

3. La conversion: Paul, aveuglé, illustre la phrase de l'Ecriture:" Nul ne peut voir Dieu sans mourir". Dans l'Ancien Testament, Exode 24 présente le Sinaï illuminé devant le peuple; en Ezekiel 1, le Seigneur lui apparaît dans la lumière…etc. Dans le Nouveau Testament, c'est la gloire que voit Saint Etienne avant de mourir, Acte 7, 54 et suivants. Ananie dans le récit, se charge du catéchuménat de Paul: il lui impose les mains (verset 12), guérit ses sens pour leur permettre de percevoir le caractère particulier de sa mission (verset 17) et le baptise (verset 18).

4. Le rôle de Paul dans l'Evangélisation. Jusqu'alors, tous les croyants étaient de race juive: la Vierge Marie, Saint Joseph, tous les Apôtres, tous les disciples, … etc. Or il se fait qu'il y avait, mêlés aux Juifs, un certain nombre de païens (exemple: le centurion Corneille, Acte 10) et tous ceux déjà préparés par le fait qu'ils faisaient partie de la synagogue, non pas par leur race mais par le fait qu'ils étaient circoncis, quoique païens. De plus, la synagogue accueillait des "hommes pieux", qualification qui désignait des païens convertis au Judaïsme mais dont les fonctions au sein de la société ne leur permettaient pas d'être circoncis. C'est ce processus de sortie de l'univers culturel sémite que décrivent les Actes des Apôtres puisque dès l'année 49, le premier concile de Jérusalem décide que la circoncision n'est plus requise pour accéder au baptême de l'Eglise du Christ. De plus, le premier récit des Actes est placé au moment où la communauté commence à être expulsée de Jérusalem; le deuxième au moment où on se sépare du Judaïsme et le troisième au moment de l'arrivée à Rome, capitale, à ce moment-là, du monde civilisé.

5. Quelques conclusions qu'on peut tirer de cet événement capital:
- le message de l'Evangile est "révélation" (Galates 1, 11-12) c'est-à-dire qu'il dépend uniquement de la décision divine et non pas de la réflexion humaine aboutissant à une conclusion en fonction d'un raisonnement bien tenu (exemple: tout ce qui est rare est cher; un cheval à 5 centimes est rare; donc un cheval à 5 centimes c'est cher!). Ce que l'Apôtre a compris, ne ressort pas non plus du genre maladie ou crise psychologique ou raréfaction de l'air dans les montagnes… Tout cela peut jouer son rôle, mais ce que l'Apôtre a compris est radicalement nouveau.
- le Dieu qui lui apparaît est Yahweh. Ce qui est souligné par de nombreuses citations de l'Ancien Testament: n'oublions pas que Paul est théologien juif.
- le point focal de la foi est défini comme étant le passage de la Croix à la Résurrection. La Loi dit:"maudit celui qui est pendu au bois de la Croix" et la foi nous dit que le Maudit est vivant. Ce qui signifie bien que par la Croix, la Loi est abolie, que la Croix se substitue à la Loi: la Loi sert donc au salut.

6. Deux autres conclusions:
- la chute est celle de toutes les institutions, de toute loi, qui perdent leur mission temporaire au profit de l'adhésion libre à Jésus-Christ, pour Jésus, en Jésus qui devient le seul médiateur parce qu'il est Dieu et Homme et nous donne de "servir Dieu en Esprit et Vérité" (Jean 4,21). La Vérité nous rend libre par le don de la liberté intérieure. Dostoïevsky, dans le Mythe du Grand Inquisiteur, fait de la liberté le don fondamental du Seigneur afin que nous puissions aimer (à relire dans les "Frères Karamazov").
- Le problème de la vie humaine n'est plus d'"arriver si possible au bonheur des dieux" comme le dit l'Antigone de Sophocle mais de" recevoir et donner", ce dont nous parlerons lors de notre prochaine rencontre du 7 décembre à 10 heures 30 à la Chapelle de Lorette.

Jacques Van der Biest
Vicaire de la Paroisse des Minimes
Le 16 novembre 2008

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